Ça passe ou ça casse. 2015 se présente comme une année cruciale pour ces trois entrepreneurs en Finance. Ils ont quitté des postes de front office, confortables, dans de grandes banques d’investissement françaises pour l’entrepreneuriat Share on twitter. Pas pour ouvrir un resto ou se lancer dans la distillation du whisky, mais pour créer leur startup en finance. Par leur histoire, ils prouvent, s’il était nécessaire, qu’une crise financière ne provoque pas seulement chaos et désolation mais opportunités et renouveau. À condition bien sûr d’accepter la prise de risques et la remise en question.
Car l’entrepreneuriat est surtout un « ascenseur émotionnel avec ses hauts et ses bas », nous résumait l’un deux. Des rencontres, du flair, de la passion, et de la tenacité. Il est forcément question de tout ça, mais aussi de changer les paradigmes de la finance. Voici 3 histoires, trois parcours entrepreneuriaux : de la genèse aux objectifs futurs, en passant par la maturation du projet. Et si l’ambition cessait d’être un vilain mot en Finance ?
Julien Messias, co-fondateur UNCIA AM, créé en 2013 : un trader infiltré dans la gestion
Quand la crise des subprimes a éclaté en septembre 2008, Julien Messias, alors Trader Dérivés Actions, venait de quitter BNP Paribas pour rejoindre ING Financial Markets. « Très vite les volumes se sont taris, tout comme les revenus de l’activité – à quoi bon à 28 ans s’accrocher et végéter dans un business en déclin ? », réfléchit le jeune trader. Un quatuor se forme alors autour du projet défendu par Vincent Fourcaut – ami de 10 ans, alors analyste chez Financière de l’Echiquier, avec Mickael Cohen, également ancien de la Financière de l’Echiquier, et Alexis Charveriat, gérant chez Ecofi Investissements. Ils rêvent d’une aventure entrepreneuriale. Ces quatre-là mettent en commun leurs compétences très complémentaires : marchés et risk management d’un côté et gestion et analyse fondamentale de l’autre. Ils travaillent ensemble à l’été 2012 sur la création d’une société de gestion spécialisé dans le stock-picking d’entreprises en forte croissance. Ils disposent de 600 k€ en fonds propres et obtiennent du seed money en convaincant des CGPI en échange de 20% des parts de la société.
Un an plus tard, mi-2013, UNCIA AM était né. « Il faut savoir être innovant, se distinguer du magma des sociétés de gestion, nous avons décidé de le faire à la fois sur la géographie (high growth, US/Emergents) et les sujets d’investissement différenciant (comme l’éducation dans les pays émergents ou les business disruptifs), explique Julien Messias. Le succès repose en outre sur des performances irréprochables ». Sur l’année écoulée, UNCIA AM affiche +7% sur le fond dynamique (volatilité à 13%) et +3% sur le fonds long-short (volatilité à 5%). L’équipe gère aujourd’hui 30 millions d’euros et vise la barre des 50 millions d’ici le printemps 2015. Une étape cruciale qui permettra de « rentrer dans le viseur des institutionnels » et de recruter. La dynamique d’embauche est déjà lancée avec la transformation d’un stage en CDI (middle office) prévue pour 2015.
Jonathan Herscovici, fondateur et CEO d’ANATEC, le financier idéaliste promis à un bel avenir
« En banque, j’étais un soldat. Un exécutant avec peu d’autonomie et peu de prise de décisions ». Pour Jonathan Herscovici, l’image se révèle à peine métaphorique puisque ce jeune entrepreneur a débuté sa carrière dans les « commandos » de Lyxor au sein des salles de marchés de Société Générale, ces programmateurs hyper rapides au service des traders. Au sein de l’équipe en charge de l’automatisation des processus de marché, il apprécie de pouvoir monter en compétences sur les techniques de programmation. Mais Jonathan rêve du front office. Il parvient à intégrer l’équipe commerciale et marketing de la gestion alternative et complète sa formation accélérée, notamment dans les stratégies de gestion complexes.
Le choc provoqué par la chute de Lehman Brothers agit en révélateur d’une finance mondiale trop opaque et peu accessible Share on twitter. C’est sur la base de ce constat que se nourrit le projet Anatec, créé en 2011. « L’idée est de changer le paradigme de la gestion d’actifs, de démocratiser les produits d’épargne, tout en répondant aux besoins nouveaux des digital natives (personnalisation, coûts réduits, sécurisation…), explique Jonathan qui s’associe avec son Directeur Technique, Zakaria Laguel, pour développer des algorithmes propriétaires reposant sur l’ingénierie financière et le Big Data. Mais l’ambition d’un positionnement BtoC se révèle trop coûteux en investissement marketing et le jeune entrepreneur comprend qu’il lui faut faire un détour par le BtoB, sans perdre toutefois son objectif de développer une banque d’épargne de nouvelle génération. Sa persévérance paye. Il légitime sa démarche en intégrant l’incubateur Telecom Paris Tech en 2012.
L’année suivante, il décroche la labellisation Finance Innovation et obtient des fonds de Scientipole (40 k€). En 2014, la jeune pousse obtient un financement de 200 k€ de la BPI en devenant Lauréat du nouveau Concours Mondial de l’innovation 2030, lancé par le gouvernement. Reste maintenant à Jonathan, figure incontournable de l’univers des FinTech parisiennes, et à sa société, qui compte déjà 6 employés, à transformer l’essai. 2015 sera donc cruciale avec le lancement de la première plateforme au second semestre et le recrutement de 10 nouveaux profils à forte valeur ajoutée.
Fabrice Bouland, fondateur d’Alphametry, le serial-entrepreneur jamais à court d’idées
Fabrice Bouland vit l’aventure entrepreneuriale depuis près de 15 ans. Après avoir travaillé comme trader sur dérivés actions chez BNP dans les belles années – entendez les 90’s – il se dit : « un jour, mes enfants et mes petits-enfants me demanderont ce que j’ai fait pendant l’explosion Internet. Il aurait été fou de passer à côté d’une telle aubaine, d’autant que mon métier m’avait permis de mettre du capital de côté ». Sauf que le lancement en 2000 de sa startup brokerhub.net, la 1ère bourse d’échanges interbancaires online pour les dérivés actions, coïncide avec le crash de la bulle Internet. La startup connaît des débuts frugaux. Fabrice Bouland lance en parallèle une société de courtage plus traditionnelle OTCex qu’il fusionne en 2007 avec HPC, spécialiste des produits de taux. Le nouveau groupe affiche un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros, et emploie 100 personnes en Europe. En 4 ans, les revenus sont doublés et sa présence étendue aux continents américain et asiatique avec 160 employés.
Mais progressivement, le nouveau contexte réglementaire en finance hérité de la crise financière fait émerger de nouvelles opportunités Share on twitter, notamment dans le domaine de la recherche actions. Fabrice Bouland est convaincu que l’equity research, qui doit s’émanciper des commissions d’exécution par ailleurs fortement dégradées par la crise, a besoin d’un nouveau modèle de distribution et de valorisation. Celui-ci doit être online, global, et transparent. L’entrepreneur, qui a revendu ses parts dans OTCex group en 2012, consulte plus de 150 professionnels pour tester son idée de « AirBnB du marché de la recherche equity ». Le projet séduit. Alphametry voit le jour mi-2014 et le site version bêta vient d’être lancé. La nouvelle plateforme permet aux assets managers et aux hedge funds d’acheter en direct de la recherche auprès d’analystes notés à partir de la performance de leurs idées d’investissement.
Les vœux de 2015 que Fabrice Bouland aimerait voir exaucés ? Un concept validé, une augmentation de capital réussie, le recrutement d’un responsable marketing talentueux mais aussi de commerciaux et de développeurs… « Ça prend toujours plus de temps que l’on croît, surtout dans une industrie très conservatrice comme la finance où les gens ne changent pas facilement leurs habitudes – regardez Internet, ça fait 20 ans, et le secteur de la ‘FinTech’ commence tout juste à émerger», explique le serial-entrepreneur, qui rêve un jour de sonner la cloche d’ouverture du Nasdaq.