Les carrières en finance ont ceci de commun avec les partis politiques qu’elles sont tributaires des fluctuations de l’économie mondiale – qui peuvent les porter au zénith pendant quelques années pour ensuite les condamner à une traversée du désert des décennies durant. Quel intérêt dans ces conditions de voir trop loin, avec le risque de tirer des plans sur la comète ? Il s’avérera sans doute préférable de faire de votre mieux aussi longtemps que vous le pourrez. Mais les coachs spécialisés dans les carrières en finance y voient un problème majeur : le temps de travail hebdomadaire ne laisse aucune possibilité pour explorer d’autres perspectives ou envisager une stratégie de carrière.
Alors que les métiers de la banque sont en profonde mutation, la sagesse engage à surmonter les tendances-clés pour assurer votre survie.
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Evitez tout processus qui laisserait la porte ouverte à l’automatisation
Faites attention aux signes avant-coureurs. L’avenir de la finance est dans l’automatisation des tâches, et pas seulement pour le back-office. Fin septembre, Marty Chavez, CIO de Goldman Sachs, déclarait que la banque avait mis au point un organigramme détaillant les 160 étapes préalables à une entrée en bourse – la majorité d’entre elles étant ‘mûres pour l’informatisation’. Paul Rowaday de Tabb Group se veut beaucoup plus direct, et prédit dans une dramaturgie propre à évoquer un cataclysme que « l’ensemble des services financiers subissent un véritable déferlement face à la volonté inébranlable de mettre en œuvre les innovations de l’ère du numérique ».
Les plus expérimentés parmi les jeunes professionnels de la finance n’ont aucun moyen de voir ce qui se prépare. Un vendeur en produits structurés nous a confié avoir quitté son job à titre préventif pour suivre un cours de codage – une décision motivée par son activité : la construction manuelle de présentations qu’il aurait été très facile d’informatiser. « Cela m’a paru plus risqué de rester dans la finance sans apprendre à coder que de partir pour suivre une formation dans ce domaine ».
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Anticipez la régulation susceptible d’impacter votre business – même si vous ne travaillez pas en conformité
Cette année, Goldman Sachs a recruté comme analyste une étudiante spécialisée dans l’impact de Bâle III et de la loi Dodd Frank. Pas en conformité, ni en risque d’ailleurs, mais en valeurs mobilières. Ce qui ne devrait d’ailleurs pas constituer une surprise. Pour reprendre les propres mots de John Gerspach, CFO de Citi, les banques sont soumises « en permanence à des vents contraires » en régulation et conformité.
Les analystes de J.P. Morgan pour leur part constatent actuellement « des risques de régulation » dus aux modifications imposées par Bâle III, à la mise en œuvre des règles de séparation au Royaume-Uni, aux changements dans la manière d’évaluer le capital et aux réformes du marché des dérivés de gré à gré. Sans oublier les adaptations à la revue fondamentale du portefeuille de négociation et à la directive MiFID II.
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Concentrez-vous sur les principaux clients, ou partez vous occuper des niches… ailleurs
Les niches sont passées de mode. Si vous travaillez pour une grande banque, l’objectif dans les cinq années à venir sera de servir vos gros clients le plus efficacement possible. Chez Citi par exemple, John Gerspach a défini le client institutionnel type de la banque comme « une entreprise multinationale de structure complexe, une composante du secteur public, une institution financière ou un investisseur global portant un budget significatif pour des produits et services financiers ». C’est sur cette base que la banque est en passe de rationaliser sa liste de clients. J.P. Morgan est sur la même longueur d’onde. Si vous voulez travailler avec des clients plus petits, vous devrez rejoindre une banque de moindre importance.
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Rationalisez vos coûts et délocalisez hors des gros centres financiers
Les années à venir impliqueront une réduction constante des coûts. Comme le démontre le graphe ci-dessous, les analystes de Morgan Stanley prévoient une stagnation des revenus jusqu’en 2017. Réussir en finance ne passera plus par la croissance, mais par l’efficacité.
Rien d’étonnant dans ce contexte à ce que Goldman Sachs n’ait recruté à Manhattan que 10,5% des effectifs prévus il y a dix ans, ou que Deutsche Bank au Royaume-Uni ait installé ses équipes de trading ‘low touch’ à Birmingham. Si vous travaillez dans un centre financier où les coûts sont astronomiques, vous devrez justifier votre salaire élevé et le coût inflationniste de votre siège. Soit vous êtes capable de générer vous-même des revenus conséquents, soit vous faites l’interface avec la direction en aidant à gérer une équipe qui génère des revenus conséquents depuis un autre site.
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Gardez le contact avec vos anciens collègues
Entre la bataille pour la réduction des coûts et des salaires plus élevés qu’ils ne l’ont jamais été, les banques sont de plus en plus réticentes à prendre le risque d’embaucher – en particulier à partir du niveau VP. Si vous envisagez de changer de job, il peut donc être utile de trouver quelqu’un qui vous connaisse déjà et apprécie vos compétences. Christian Robbins, chasseur de têtes chez Macro Tradestone à Londres, indique que la plupart des recrutements de ces derniers mois à la City s’inscrivent largement dans cette tendance – témoins ceux de Murray Roos en capitaux propres pour Citi, qui ne constituent que l’un des multiples exemples.
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Devenez un fin stratège
Enfin, à l’heure où les banques n’ont plus d’alternative et surtout plus les moyens de tout faire pour tous leurs clients, elles devront s’attacher dans les cinq ans à venir à définir exactement ce qu’elles veulent devenir. Voilà qui justifie la décision de Tidjane Thiam, CEO de Credit Suisse, d’embaucher comme ‘senior advisor’ un banquier FIG en préalable à la restructuration de la banque. Dans le même ordre d’idées, l’une des priorités de John McFarlane chez Barclays a été de recruter un ‘as de la stratégie et de la transformation’ pour aider au processus de réduction des coûts – d’ailleurs, si le cœur vous en dit, rien n’indique que le poste soit déjà pourvu…
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