Comment ce fait-ce que les banques européennes basées sur le sol américain réduisent les effectifs ? Peut-être que cela s’expliquer de par le fait qu’elles soient soumises à des restrictions salariales plus coûteuses que celles de leurs concurrentes américaines, ou bien parce que des banques comme UBS et Royal Bank of Scotland ont embauché massivement et doivent aujourd’hui réajuster les effectifs. Ou bien tout simplement parce qu’elles luttent pour rivaliser avec les banques d’investissement locales.
Quoiqu’il en soit, les professionnels de la finance aux Etats-Unis plébiscitent les banques d’investissement américaines. Que ce soit dans le Top 20 Global US du classement eFinancialCareers Ideal Employer 2016, ou bien dans le Top 10 US des établissements financiers, ce sont Goldman Sachs, J.P. Morgan et Morgan Stanley qui caracolent en tête. Et tandis que les banques européennes sont plutôt bien placées dans les classements mondiaux (notamment BNP Paribas classée 23e dans le Top 30 mondial), seule l’une d’entre elle – Deutsche Bank – apparaît dans le Top 10 US, en queue de peloton.
Cela signifie-t-il que banques européennes ont un problème de perception en Amérique ? Tout porte à le croire au regard des résultats du sondage qui montrent qu’elles ne sont pas autant plébiscitées par les financiers américains alors qu’elles le sont par les financiers en Europe ou en Asie. « Les salaires dans les banques d’investissements US sont sensiblement les mêmes que ceux dans les banques d’investissement européennes, mais ces dernières n’ont pas versé des bonus aussi élevés que leurs consoeurs américaines », explique Mike Brothers, managing consultant de la pratice Banque d’Investissement chez Michael Page.
Des banques européennes moins bien placées dans le classement US que mondial…
Barclays termine 10e dans le classement mondial des établissements financiers mais n’apparaît pas dans le Top 10 US. Son CEO Jes Staley a pourtant l’ambition de faire des incursions en Amérique et a promis d’embaucher davantage de banquiers d’investissement basés à New York pour doper sa BFI américaine.
Barclays, Credit Suisse et Deutsche Bank ont toutes fortement réduit ou vendu leurs divisions américaines de gestion de fortune. Quant à UBS et Royal Bank of Scotland, elles ont ouvert d’énormes salles de marchés dans le Connecticut au plus haut de la crise mais se sont rapidement retirées depuis. Les effectifs de RBS dans le Connecticut sont ainsi passés de 2.400 à moins d’un millier de salariés, et ceux d’UBS de 4.400 avant la crise financière à 2.000 l’an dernier, et beaucoup sont ceux qui prédisent d’autres réductions à venir…
Les banques européennes sont sans aucun doute perçues comme plus faibles que leurs rivales américaines dans des domaines clés. Deutsche Bank, la banque européenne la mieux classée, est ainsi perçue comme étant peu généreuse : à peine 57% de ceux qui souhaiteraient y travailler s’attendent à un salaire compétitif, contre 84% chez Goldman Sachs.
De même, HSBC qui occupe pourtant la 6e place du classement mondial, derrière Citibank mais devant BoA Merrill lynch et Wells Fargo, n’arrive que 10e dans le classement US, derrière ses concurrentes américaines. Parmi les répondants américains, les points forts de HSBC sont des salaires attractifs (71%), des avantages sociaux intéressants (76%) et un travail stimulant et/ou intéressant (76%). Cependant, un plus petit pourcentage de répondants indiquait comme points forts les horaires de travail gérables (47%), les possibilités de travail flexible (41%), une banque innovante dans l’industrie financière (47%) et progressiste sur les questions de diversité ou de RSE (41%).
Credit Suisse, au 10erang à l’échelle mondiale, mais seulement 15e aux États-Unis, a annoncé en février le départ que Nathan Romano, qui l’avait aidé à mener sa stratégie visant à accroître la collaboration entre ses divisions BFI et Banque Privée, du fait du retrait de la banque suisse de la gestion des clients fortunés américains
Cela dit, les banques européennes ne sont pas prêtes de disparaître : UBS, Credit Suisse et HSBC font encore toutes partie du Top 10 US des établissements financiers. Seulement, leur rayonnement outre-Atlantique ne correspond pas à ce qu’ils ont accompli en Europe ou en Asie. « Les gens sont prêts à rejoindre des banques qui sont instables, telles que Barclays, Deutsche Bank et Credit Suisse. Mais l’écart qui va du simple au double au niveau des bonus en dissuade plus d’un », reconnaît Oliver Hayes, responsable de la BFI Amérique au sein du cabinet de recrutement Selby Jennings.
Qui plus est, si une banque a enregistré des pertes importantes dans différentes activités, cela aura un impact supplémentaire sur les bonus des banquiers d’investissement. « Je n’irai pas jusqu’à dire que les divisions de banque d’investissement de certains banques européennes ont mal performé [en 2015], pas plus que les activités actions. Par contre, les activités fixed income, devises et matières premières (FICC) ont eu une année terrible, qui impactera les autres activités des banques, dont beaucoup cherchent à réduire les effectifs aux États-Unis », poursuit-il.
« Elles n’ont pas besoin d’avoir beaucoup de personnel sur place, contrairement aux années de bonnes performances. Si j’étais un candidat en BFI en train de soupeser les offres concurrentes, j’aurais tendance à éviter clairement les banques européennes, étant donné que Credit Suisse et Barclays connaissent un environnement instable et ne distribueront pas de gros bonus cette année ».
La plupart des banques d’investissement américaines ne se sont pas toutes désengagées en même temps des différents secteurs d’activités, à l’inverse des banques européennes qui se sont parfois retirées de lignes d’activités entières. Ce qui a probablement entaché leur réputation à Wall Street. La banque qui a fait le plus grand bond dans le classement mondial est Wells Fargo, qui se classe 14e mondial et 7e aux US, et parmi les plus fortes progressions on peut citer Bank of America Merrill Lynch, passée de la 8e à la 4e place du classement américain.
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