Voilà encore un domaine où les Français sont champions du pessimisme. Dans l’industrie financière, lorsque l’on interroge les professionnels à propos de leur prochain bonus, les employés en France affichent les plus faibles attentes. Seule une minorité d’entre eux (38%) s’attendent à un bonus en hausse, selon la dernière enquête* eFinancialCareers. Rappelons que ce chiffre est plus élevé partout ailleurs : 42% aux Etats-Unis, 50% à Singapour, 53% à Hong-Kong et surtout 58% en Grande-Bretagne et 61% dans les pays du Golfe, d’après une étude réalisée par eFinancialCareers sur ces marchés en octobre dernier.
Cette prudence s’explique par un contexte économique français et européen toujours tendu et une forte rigueur budgétaires au sein des établissements financiers, illustrée notamment par de nouvelles suppressions de postes dans des grands groupes français (comme Société Générale et Natixis).
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Les banquiers d’investissement et les gestionnaires d’actifs français ont aussi probablement tiré les leçons de leurs derniers bonus : fin 2012, ils étaient 69% à attendre un bonus en hausse, pourtant quelques mois plus tard, nous les avions interrogés à nouveau après le versement de leurs bonus et 53% affirmaient avoir finalement reçu un variable en baisse par rapport à l’année précédente…
Le pari du statu quo
Les banques françaises ont néanmoins toutes redressé la barre des résultats cette année. Au vu de ce tableau mitigé, beaucoup de financiers misent donc sur un statu quo de leur bonus : 42% pensent que celui-ci se maintiendra. Ils restent néanmoins convaincus pour leur grande majorité qu’ils ne seront pas sanctionnés par un « zero bonus » : seuls 14% des Français s’y préparent, contre respectivement 27% et 26% des professionnels basés outre-Atlantique et outre-Manche. Faut-il y voir ici le poids de la tradition des établissements hexagonaux à harmoniser la politique de distribution des bonus ? Peut-être. Toujours est-il que l’individualisation des bonus est bien en marche dans l’industrie financière française…
Ces changements, accompagnés de l’application prochaine de la réglementation européenne sur le plafonnement des bonus, renforce l’incertitude sur la question des rémunérations dans le secteur. À un horizon de 3 ans, les financiers français sont très partagés sur l’évolution des bonus, comme l’indique le tableau ci-dessous.
Plus positifs sur les fixes et la sécurité de l’emploi
Faute de visibilité sur l’évolution des bonus, les financiers français préfèrent croire que le curseur est désormais placé sur les rémunérations fixes. Alors que 53% des financiers français disent avoir déjà bénéficié d’une augmentation de salaire au cours de 2013, ils sont 42% à s’attendre à une augmentation de leur fixe dans les 6 prochains mois. Près de 30% d’entre eux anticipent même une revalorisation supérieure à 10%.
Enfin, dernier paradoxe souligné par cette enquête : la relative quiétude des banquiers concernant leur emploi dans un contexte pourtant marqué par les coupes d’effectifs et les délocalisations. Les répondants français sont plus nombreux (45%) à envisager en 2014 des réductions d’équipes chez leur employeur qu’une hausse des effectifs (19%). Pourtant, 69% des financiers ne se déclarent pas inquiets pour leur sécurité de l’emploi.
*Enquête en ligne menée en novembre 2013 auprès de 276 professionnels de la finance résidant ou travaillant en France. Une majorité des répondants travaillent en front-office (57%), principalement dans des BFI et des sociétés de gestion, plutôt dans des grands groupes (52% sont employés par des sociétés comptant 1.000 salariés et plus), employés par des établissements français dans leur très large majorité (80%). Enfin, notons que 15% des sondés ont changé d’employeur au cours de cette année.