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Le retour de l’affaire Kerviel met-elle en lumière une culture SocGen à part ?

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Avec l’article explosif de Mediapart publié dimanche et le témoignage troublant d’une commandante de police sur les dysfonctionnements rencontrés lors de son enquête, l’affaire Kerviel connaît donc un nouveau feuilleton médiatique et bientôt judiciaire.

Selon ces nouvelles révélations, la banque « savait » et, pis encore, aurait fait pression sur des employés pour dissimuler la vérité. Qu’en est-il vraiment ? Qu’est-ce que cela dit des pratiques managériales chez SGCIB ou plus largement dans le secteur de la banque d’investissement ?

Pression sur les cadres ?

Mediapart rapporte des témoignages selon lesquels le directeur financier de l’époque, Frédéric Oudéa, devenu PDG de Société Générale depuis, aurait exercé une pression sur un certain nombre de cadres pour signer « un engagement de confidentialité de tout ce qu’ils avaient pu apprendre et qu’ils s’engageaient même à ne pas en parler à leur propre conjoint ».

Personne n’a encore apporté la preuve de l’existence d’un tel document, la plupart des cadres dirigeants de Jérôme Kerviel de l’époque ont quitté la banque et tourné la page, à l’instar de Jean-Pierre Mustier, ex-patron de SGCIB, passé par UniCredit et nouvel associé de Tikehau Capital Partners ; de son bras droit Patrick Soulard, aujourd’hui directeur général d’UniCredit pour la France ; ou encore d’Eric Cordelle, l’ancien boss direct du “rogue trader” reconverti lui, dans la distillation de whisky en Bretagne.

Tout comme la banque qui a réagi par voie de communiqué dans la nuit de dimanche à lundi, les employés et représentants syndicaux contactés se disent surpris par l’annonce de cet « engagement de confidentialité » dont les signatures auraient été obtenues auprès des intéressés après avoir été «  séquestrés ». Personne ne semble en avoir entendu parler, et tous jugent cette version assez invraisemblable.

La journaliste bloggeuse Aliocha classée parmi les anti-Kerviel, s’amuse dans son blog ce matin : « Une clause de confidentialité dans un contrat de travail est perçue et présentée comme sorcellerie. La mise en place d’un dispositif destiné à empêcher la fuite d’une information privilégiée se transforme en ‘prise d’otage’ ».

Culture du secret

La question de la méthode reste cependant entière. Un représentant syndical salarié en middle office chez SGIB explique que les agissements de l’inspection générale – une unité d’élite chargée notamment de missions d’audit interne – peuvent paraître « parfois abusifs » : « deux inspecteurs arrivent à votre bureau à l’improviste, ils vous isolent dans une salle pour vous auditionner, ce qui est forcément impressionnant et ressenti comme une pression ».

Mais ces méthodes ne sont pas a priori propres à SGCIB. Après tout, des inspecteurs généraux exercent ces mêmes missions d’audit dans toutes les BFI françaises. Sans oublier que l’environnement de travail dans les banques d’investissement se révèle partout stressant – avec un employé sur quatre subissant des violences psychologiques, selon une récente étude. « La culture du secret domine et pèse sur les employés des BFI, analyse Régis Dos Santos, président du syndicat National de la Banque (SNB / CFE-CGC). Des dossiers d’employés soumis à la pression de leur management et à la signature de documents de confidentialité ou menacés de perdre leur emploi, nous en avons plein ! Ce nouvel épisode de l’affaire Kerviel met surtout en lumière la nécessité d’avancer sur la problématique des lanceurs d’alerte ».

Sauve qui peut…

L’affaire Kerviel a laissé des traces en interne Share on twitter, d’autant que cette perte de 5 milliards a précédé de quelques mois seulement une crise financière sans précédent après la chute de Lehman Brothers, qui a entraîné chez SGCIB de nombreuses réorganisations et suppressions de postes. Dans ce contexte troublé, le malaise des équipes a été profond. Ou sinon comment expliquer le succès du plan de départs volontaires de la Société Générale de 2012 lorsqu’en seulement 10 jours 2.200 candidats au départ se sont bousculés au guichet alors que seuls 880 suppressions de postes avaient été prévues pour la BFI. Le plan était certes généreux mais le marché de l’emploi était aussi à l’époque encore très morose…

La pression sur les équipes était forte, nous explique l’un des représentants syndicaux qui avaient négocié avec la direction les conditions du PSE : « Il n’y avait pas beaucoup de business et les collaborateurs n’étaient pas bien traités en termes de bonus mais l’engouement pour le PSE nous a tous surpris. Le problème c’est que le contrat social au sein des BFI, et peut-être plus encore chez SGCIB, repose largement sur le bonus. Tant que les bonus sont bons, les gens sont contents… La direction n’a probablement pas suffisamment offert d’autres contreparties comme des perspectives de développement professionnel », explique ce dernier.

Sauf que les salariés et certains observateurs pointent aussi l’élitisme de SGCIB, une organisation très hiérarchique, dont le poids des réseaux école et de la politique interne pèsent fortement sur les mécanismes de promotions. « Il y a trop de politique, en tant que jeune on en paie le prix fort », témoigne un jeune vendeur de SGCIB sur le site Glassdoor.fr. Des points négatifs en partie compensés par un environnement de travail « stimulant sur le plan intellectuel » et des vacances généreuses, peut-on lire dans les commentaires postés sur ce site qui recueille les témoignages et les notes données par les professionnels à leur employeur.

Corporatisme et honneur

Il n’empêche. Comme l’indique le tableau ci-dessous avec les données collectées par Glassdoor pour eFinancialCareers.fr, SGCIB est la banque française la moins bien notée par ses employés Share on twitter. Paradoxalement Frédéric Oudéa, bénéficie, lui, d’un large consensus des employés de SGCIB. Un plébiscite qui s’explique par le redressement de la banque que ce dernier a opéré, mais peut-être aussi parce que ce diplômé de l’ENA et de Polytechnique est finalement le parfait représentant de la culture élitiste de la banque avec des débuts dans les ministères avant d’être embauché par l’ex-CEO Daniel Bouton pour rejoindre SGCIB et y faire une carrière fulgurante qui le conduira à la tête de la banque.

glassoor-BFI

Source : Glassdoor.fr

Le silence des salariés dans l’affaire Kerviel a sûrement quelque chose à voir avec l’honneur de la maison qu’ils représentent. Il faut savoir que « SGCIB est une banque dans la banque, relève de son côté un représentant syndical. Cette BFI s’est développée dans les années 90 comme une marque autonome et agile, à tel point que les employés de SGCIB ont parfois l’impression d’appartenir à une filiale, et non comme faisant totalement corps avec le groupe »

Pour Régis Dos Santos, SocGen est la BFI française avec l’esprit maison le plus corporatiste Share on twitter. “On défend ici sa banque quoi qu’il arrive ! Cela vient du fait notamment que dans le passé la SG a été la proie à des OPA et la direction a toujours su en jouer pour resserrer les rangs ».

Pas sûr donc que ces nouveaux développements de l’affaire Kerviel engagent de véritables avancées sur le plan judiciaire. Les langues sont décidemment difficiles à délier. Et les employés font corps. À moins que la culture du secret et du corporatisme finissent par se fissurer sous ce nouvel assaut ?



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