Vous avez en tête de travailler pour un Big Four, mais vous hésitez dans votre choix. Après tout, ces grands cabinets d’audit et de conseil sont assez semblables. Enfin, cela dépend de qui vous questionnez sur le sujet.
« Ils sont tous plus ou moins pareils, confie un recruteur spécialiste des Big Four. Ils vont tous vous faire travailler dur. Ils servent tous des grands clients. Et partagent la même dimension internationale ». Jean-Marc Mickeler DRH et associé chez Deloitte à Paris nuance : « Les Big Four sont très comparables notamment par leur taille et leur organisation mais des différences existent en matière de culture et d’activités ».
Les employés qui ont connu une mobilité entre ces employeurs peuvent en témoigner : « quand je suis passé de Deloitte à EY, j’ai senti d’importantes différences culturelles, nous confie un professionnel parisien confirmé. L’intégration mondiale est beaucoup forte chez EY, beaucoup de choses se font sinon à l’échelon mondiale au moins à l’échelon européen (formation, gestion des ressources, promotions…). En comparaison, Deloitte m’a apparu beaucoup plus franco-français ».
Deloitte et aussi KPMG sont les big four les plus grosses en termes d’effectifs en France, avec chacune respectivement 9.000 et 8.300 employés. Ceci s’explique par leurs activités en expertise-comptable plus développées et donc un maillage régional plus important (plus de 200 implantations en France chacune). EY ne compte que sept bureaux en région et se targue de se concentrer « davantage sur les entreprises du CAC 40 et moins sur le ‘middle-market’ ».
Du fait d’un focus plus important dans le conseil, Deloitte met de son côté en avant une culture plus entrepreneuriale, indiquant pour preuve que 15% des 984 millions d’euros de chiffre d’affaires de 2014 en France proviennent d’activités qui n’existaient pas encore il y a quatre ans (RSE, cybersécurité, innovation, capital humain…). « Et ces nouvelles activités ont pu être développées en interne. Nous encourageons fortement l’initiative auprès de nos consultants », fait valoir Jean-Marc Mickeler DRH.
De son côté, Sylvie Magnen, associée et DRH chez EY, défend la culture particulièrement pluridisciplinaire chez EY : « nous sommes désormais complètement organisés en ‘market segment’ [secteur d’activité] et plus du tout en métier (audit, avocat, conseil), y compris en matière de reporting ».
Pour vous aider à y voir clair dans ses allégations et contre-allégations, nous avons recueilli les données disponibles, les classements et les témoignages postés sur Internet par les employés des Big Four. Voici les éléments et les arbitrages qui en ont découlés. Si vous avez, vous aussi, des contre-arguments, surtout n’hésitez pas à les apporter au-bas de l’article !
Premier par la taille : Deloitte
Si vous souhaitez intégrer, parmi les Big Four, l’un des colosses au niveau mondial, ce sera Deloitte… ou à la rigueur PwC. Les deux sont régulièrement tour à tour leaders en termes de chiffre d’affaires. Au dernier classement, Deloitte tient la tête avec un CA de 34,2 milliards de dollars, devançant de peu PwC, crédité de 32 milliards. EY suit avec 27,4 milliards, tandis que KPMG reste au pied du podium avec ‘seulement’ 24,8 milliards.
Côté effectifs, tous affichent des chiffres équivalents à la population d’une ville moyenne. Là aussi, Deloitte tient la corde avec 210.000 employés dans le monde à la dernière estimation. Suivent dans l’ordre PwC avec 195.000 personnes, puis EY avec 190.000 et enfin le ‘petit poucet’ KPMG qui n’affiche ‘que’ 162.000 collaborateurs.
Avec ses 9.000 employés dans l’Hexagone, Deloitte est aussi en tête en France en termes d’effectifs mais au coude-à-coude avec KPMG (8.300). Loin derrière, EY et PwC comptent environ deux fois moins de salariés avec 4.650 et 4.000 d’employés respectivement.
Premier en croissance mondiale : EY
Les Big Four sont des mastodontes bien établis. Vous n’y trouverez pas de chiffres de croissance hallucinants. Le cabinet affichant la croissance la plus rapide en chiffre d’affaires sur 2014 est EY, avec un solide 6,8% tout au long de l’année.
On observe cependant des différences notables suivant les régions. Si vous recherchez un cabinet à forte croissance aux Etats-Unis, tournez-vous vers KPMG, qui a atteint 10,1% outre-Atlantique l’an dernier. Si vous misez sur l’Asie, ce sera plutôt PwC dont la croissance a atteint 9,1% en 2014, contre 3,8% pour KPMG sur la région Asie-Pacifique. En France, Deloitte est celui qui affiche la meilleure progression avec 10,5% de son chiffre d’affaires entre 2013 et 2014, devant PwC (5%).
Premier en audit : PwC
Si l’audit est votre domaine, PwC est le premier cabinet au niveau mondial. Sa division Audit lui a rapporté quelques 15 milliards de dollars en 2014 – soit 34% de plus qu’EY, son suivant immédiat. PwC tire également une forte proportion de ses revenus de l’audit avec 44%, contre 30% pour Deloitte.
Premier en conseil : Deloitte
Deloitte se positionne clairement comme l’équivalent en conseil de PwC en audit. Si les quatre grands cabinets sont en train de développer leur branche Conseil, Deloitte, qui a conservé la sienne depuis le début des années 2000 après le scandale Enron, part avec un sérieux avantage. Pour preuve les 17,6 milliards de dollars générés par l’ensemble de ses activités de conseil l’an dernier – soit 76% de plus que son concurrent le plus sérieux (PwC).
Premier pour l’égalité professionnelle : EY
Comme les banques d’investissement, les Big Four manquent cruellement de femmes à des postes de direction. Comme les banques d’investissement, ils ont mis en place de nombreux programmes pour tenter de remédier à cette situation. Et comme les banques d’investissement, ils ne semblent pas aller bien loin. D’après les chiffres de l’an dernier, c’est EY qui tire le mieux son épingle du jeu – avec 26% de femmes parmi les nouveaux ‘partners’. Deloitte se classe bon dernier, avec seulement 21% de femmes promues aux rangs de partner, principal et directeur.
Premier en recrutement en France : Deloitte
En France, les Big Four ont prévu de recruter plus de 3.500 personnes en CDI en 2015. Deloitte est en tête avec 1.000 embauches prévues, devant KPMG et EY (850) et PwC (820).
La part des jeunes diplômés dans ces embauches est partout dominante. D’ailleurs sur ce terrain, les chiffres sont encore plus comparables entre Deloitte, EY et KPMG qui ont prévu d’intégrer environ 700 jeunes diplômés chacun en 2015. Au niveau mondial, il est tout autant difficile de les départager. Retenons qu’elles embauchent à elles quatre chaque année assez de jeunes pour staffer une petite banque d’investissement. L’an passé PwC a enrôlé 20.000 jeunes diplômés dans le monde et EY 18.000.
Premier pour le prestige : PwC dans le monde, EY en France
Au niveau mondial, PwC est le meilleur cabinet si vous privilégiez le prestige. PwC est ainsi arrivé en tête du classement américain Vault 2015, devant EY, Deloitte et KPMG. « PwC a toujours été perçu comme celui qui servait les meilleurs clients », explique un recruteur londonien spécialiste de l’audit (cela pourrait changer avec la nouvelle obligation faite aux entreprises de changer d’auditeur tous les 10 ans au sein de l’UE ).
En France, la donne est légèrement différente. EY a depuis des années la préférence des étudiants de commerce, comme l’indique le graphique réalisé par Universum pour eFinancialCareers.fr, ci-dessous. « Son changement de nom il y a deux ans a en outre dynamisé la marque grâce à un important travail de communication », nous a récemment confié Aurélie Robertet, directrice France d’Universum. Une opportunité que n’a visiblement pas su saisir PwC en 2010 en réduisant son nom : 2e en 2009, PwC a été relégué cette année à la dernière place des Big Four préférés des étudiants, selon Universum.
Classement Universum 2015 (Étudiants Commerce) : Tendances sectorielles du secteur Audit et Conseil en France
Chez les professionnels expérimentés, interrogés pour la première fois par Universum cette année, Deloitte arrive cependant premier, juste devant PwC, EY et KPMG.
Le plus apprécié de ses salariés : EY et PwC
Selon le classement Glassdoor.fr des cabinets de conseil les plus appréciés de leur employés, EY et PwC sont au coude à coude avec une note générale donnée par leurs employés de 3.7 /5 contre 3.6 pour Deloitte et 3.5 pour KPMG. La moyenne – tous secteurs et pays confondus – atteint 3.2 / 5 sur Glassdoor. En Angleterre, EY se distingue également dans le classement 2015 des ‘25 Best Big Companies to Work For’ en se plaçant au 14e rang, devant Deloitte (22e), les autres sont absentes de la liste.
Premier pour l’équilibre vie pro / vie perso : aucun
Si vous êtes auditeur ou consultant dans un Big Four, vous travaillerez probablement moins qu’en banque d’affaires. Mais vous allez tout de même travailler dur. Les quatre cabinets sont régulièrement fustigés par leurs employés pour le rythme de travail et les nombreux déplacements, peu compatibles avec une vie de famille. « Stress », « sacrifices », « pression »… sont des mots qui reviennent à la bouche des employés qui témoignent sur des sites Glassdoor ou Vault. Cette contrainte d’investissement personnel est propre à ces métiers chronophages que sont le conseil ou l’audit. Pour mieux concilier sa vie pro et perso, vous pouvez toujours écouter les astuces des banquiers qui connaissent très bien cette problématique.
Premier pour la rémunération : Quid !
Le salaire d’entrée se situe partout dans la même fourchette, c’est-à-dire quelque part entre 33k à 44k€ selon le profil académique, les stages, et le métier. En avançant dans la carrière, il est bien plus difficile d’établir un classement fiable, les rémunérations étant certainement assez semblables à métier et expérience équivalente.
Emolument.com, le site spécialiste des rémunérations en Finance / Conseil, s’y est pourtant essayé, plaçant Deloitte en tête des big four les plus généreux en France. Ces données sont sujettes à controverse. « Bien trop surévaluées ! », nous a assuré Jean-Marc Mickeler chez Deloitte qui donne les fourchettes suivantes, tous métiers confondus : 35 à 50 k€ entre 0 et 5 ans d’expérience ; 50 à 70 k€ pour 5 à 10 ans d’expérience ; et 80 à 150k€ pour 10 ans d’expérience et plus (hors associés).
Pour sa défense, Emolument précise que ses données sont exclusivement issues de salariés parisiens diplômés du top 5 des écoles de commerce françaises (HEC, ESSEC, ESCP…) travaillant sur les fonctions centrales – Audit et Conseil, mieux rémunérées que les fonctions dites « annexes ».
De son côté, EY nous a indiqué des rémunérations de 58-65k€ à 5 ans d’expérience et 80-90 k€ à 10 ans d’expérience. Les données d’Emolument pour Londres (dont l’échantillon est beaucoup plus large qu’à Paris) place EY en tête pour ceux qui font toute leur carrière dans le secteur, et PWC en queue de peloton.