L’association Force Femmes vient de rendre public les résultats d’une enquête intitulée Quel avenir pour l’emploi des femmes de plus de 45 ans ? réalisée entre mars et mai 2015 auprès de 83 DRH (parmi lesquels 13,4% travaillent dans le secteur de la Banque et Assurances), 51 cabinets de recrutement et 776 femmes de plus de 45 ans sans emploi. « Ces enquêtes permettent de donner de nouvelles clés de lectures qui, je l’espère, pourront participer à une meilleure intégration des femmes de plus de 45 ans dans l’emploi», a déclaré à ce sujet Françoise Holder, présidente de Force Femmes.
Il faut dire que les résultats de l’enquête sont éloquents : une grande majorité des femmes sondées déclarent être confrontées à de nombreux stéréotypes sur le marché du travail, dont les plus importants sont : le coût, la mauvaise connaissance des NTIC, le manque de dynamisme et le temps restant à travailler dans l’entreprise trop court. Ces stéréotypes sont partagés à la fois par les cabinets de recrutement, les DRH et les femmes, qui intègrent ces préjugés, jusqu’à s’autocensurer dans leurs démarches.
Près 76% des cabinets de recrutement pensent que ces femmes font preuve d’autocensure et 47% considèrent qu’il est difficile de «placer une femme de plus de 45 ans». Et au-delà, c’est encore pire : « Il y a encore trop de préjugés sur les femmes de 50 ans, les employeurs pensent qu’à 50 ans on est sans dynamisme, sans énergie, malade, lente, incompétente pour se renouveler et se former », indique l’une d’entre elles, citée dans l’enquête.
La finance ne fait pas exception
Dans une recherche d’emploi, l’âge reste de loin le facteur le plus discriminant, devant le sexe. C’est ce que pensent 76% des femmes interrogées. En revanche, 68% d’entre elles estiment que le fait d’être une femme n’en est pas un. « Dans certains métiers comme la finance de marché, la banque d’affaires, les fusions acquisitions, on ne trouve d’ailleurs guère plus d’hommes que de femmes âgés de plus de 45 ans », explique Valérie Boussard, professeur de Sociologie et responsable scientifique du programme de recherche « Carrières de la finance » au CNRS. Même les managers hommes ont la généralement petite cinquantaine, guère plus. Il n’empêche, le fait d’être une femme ne facilite pas l’ascension professionnelle. Dans les services financiers, les femmes ne sont que 13 % à être cadres dirigeantes et 9 % à siéger au comité exécutif, selon une étude du cabinet McKinsey.
En outre, les salles de marché restent dominées par les hommes, de même que le private equity et les M&A ne sont pas des secteurs que l’on peut qualifier de “women friendly”. « Dans les métiers du conseil en banque d’affaires, par exemple, les employeurs reçoivent plus de candidatures d’hommes que de femmes, y compris en sortie d’école aux effectifs pourtant paritaires », poursuit Valérie Boussart.
Et les recruteurs ne corrigent pas vraiment ce différentiel. Il faut dire qu’en France, 74 % des cabinets de recrutement n’ont pas de politique RH dédiée à la question du genre et 72 % n’ont pas de politique RH dédiée à la question de l’âge. Peut-être pourraient-il s’inspirer de certaines pratiques anglo-saxonnes comme celle de la Lloyds Bank au Royaume-Uni qui a interdit cet été la constitution de short-lists exclusivement masculines de la part des chasseurs de têtes à qui elle a confié un mandat. « La multiplicité des canaux de recrutement constitue également un élément de nature à élargir le vivier des candidatures et le positionnement de profils différents », ajoute Françoise Holder.
Des raisons d’espérer
Les recruteurs reconnaissent toutefois des avantages aux femmes de plus de 45 ans : expérience, autonomie, organisation, capacité de recul. Et les femmes en ont conscience: 60% se déclarent confiantes en l’avenir. Pour retrouver un emploi, une majorité d’entre elles est même prête à faire des concessions sur le salaire (68%) ou la durée du contrat (62%) . « Je suis de nature optimiste et persévérante, j’ai retrouvé un emploi à 50 ans en acceptant une baisse de salaire de 40%», témoigne l’une d’entre elles. Rester positives est donc nécessaire autant dans leurs recherches d’emploi que pour l’image qu’elles donnent d’elles-mêmes.
Qui plus est, certaines initiatives commencent à porter leurs fruits. C’est le cas du club “Afic avec elles » qui tente de féminiser les équipes d’investissement dans le private equity où l’on ne compte que 19% de femmes. « C’est peu, mais ça progresse, L’année précédente, elles n’étaient que 17% », relativise sa présidente Sophie Paturle.
Par ailleurs, si la création d’entreprise peut être pour certaines un moyen de créer leur propre emploi après des recherches infructueuses, elle peut aussi constituer pour d’autres une réelle envie d’entreprendre et constituer un facteur d’épanouissement. C’est le cas par exemple de Florence Ribes qui, après avoir travaillé en cabinet d’audit, a monté Iris Financing, une structure de corporate finance spécialisée dans les opérations de haut de bilan dans le secteur des nouvelles technologies. Un bon moyen de casser le fameux plafond de verre…