Vous avez passé le cap de la candidature en ligne pour un poste de jeune diplômé dans une banque d’investissement et vous êtes frayé un chemin dans la jungle des premiers entretiens. Vous voilà maintenant à deux doigts de décrocher un job d’analyste… mais avant cela, il vous faudra encore surmonter avec brio l’épreuve de l’assessment centre.
Ces fameux ‘assessment centres’, bien plus courants dans la région EMEA qui englobe l’Europe mais aussi le Moyen-Orient et l’Afrique, que dans les autres parties du monde – se déroulent tout simplement au siège de la banque d’investissement qui recrute, et durent pour la plupart une bonne partie de la journée. Ils ont souvent lieu en fin d’année, au moment où les banques finalisent leur sélection des meilleurs candidats après les entretiens de l’automne.
Si tous les assessment centres diffèrent en fonction des banques qui les organisent, ils ont cependant un tronc commun qu’il est bon d’avoir identifié avant le grand jour.
Avant de participer à un assessment centre
Pour une bonne préparation à un assessment centre en banque d’investissement, astreignez-vous à lire régulièrement le Financial Times, le Wall Street Journal ou autre publication économique du même type ; c’est en tous cas le conseil de Maura Smith, membre de l’équipe de recrutement campus chez J.P. Morgan. « Participez à toutes les simulations d’entretien possibles et imaginables proposées par la banque ou en lien avec leur département Carrières, ou entraînez-vous avec vos amis. Assistez aux présentations ou événements de la banque, ou faites des recherches en ligne pour vous assurer de bien comprendre la banque et le poste qui vous sera proposé. Et prenez le temps de répondre aux questions récurrentes en entretien classique, afin d’éviter de trébucher sur vos propres réponses », ajoute-t-elle.
Non, vous n’en aurez pas fini avec les entretiens individuels
Malheureusement, ce n’est pas encore la fin des multiples questions auxquelles vous avez été soumis dans les premières phases du recrutement – vous en aurez bien d’autres durant l’assessment centre. Vous serez généralement confronté à des banquiers seniors plutôt qu’à des analystes ou associates, avec parfois une personne des RH. « Attendez-vous à devoir répondre à de longues séries de questions qui concerneront – sans que la liste soit exhaustive – votre sens commercial, vos capacités de leader, vos compétences analytiques, le travail d’équipe, ce que vous considérez comme vos forces/développements personnels, vos compétences mathématiques, et tous les éléments de votre CV susceptibles de s’y prêter », indique Maura Smith. Pour Yukiko Hizumi, du pôle de recrutement jeunes diplômés chez Barclays Asie Pacifique, « il est tout aussi important de préparer quelques exemples à citer en cas de question sur votre expérience en finance, qu’il s’agisse de vos activités universitaires ou de vos stages ».
Attendez-vous à des questions portant sur vos compétences
Si jusqu’à ce stade du recrutement, vous avez pu éviter les questions sur vos compétences, il n’en ira pas de même durant les entretiens de l’assessment centre. Soyez prêt à répondre à des questions qui permettront à votre interlocuteur de tester votre comportement dans un cas de figure donné. Elles commencent généralement par ‘Parlez-moi de la période durant laquelle…’ et sont destinées à tester vos compétences analytiques, motivationnelles et individuelles – par exemple ‘parlez-moi d’une occasion où vous avez identifié une nouvelle approche à un problème spécifique.’ Ne vous précipitez pas, structurez votre réponse en utilisant la fameuse technique STAR – décrivez la Situation dans laquelle vous vous trouviez, la Tâche requise, l’Action que vous avez menée et enfin le Résultat obtenu.
Soyez clair et concis dans vos réponses
Comme l’indique Yukiko Hizumi, « il y a un temps imparti à chaque candidat pour les entretiens individuels ; nous recherchons donc des candidats capables de proposer à leurs interlocuteurs des réponses succinctes mais structurées ”.
Montrez ce que vous aimez dans la banque d’investissement
Certains étudiants passent le plus clair de cette journée à mettre l’accent sur leurs capacités de communication, ou s’enflamment lorsqu’il s’agit de répondre à des questions sur leurs compétences, mais sont incapables de démontrer leur intérêt pour une carrière connue autant pour ses volumes de travail quasi insurmontables que pour le nombre astronomique d’heures de travail. Maura Smith précise que « si les candidats n’ont absolument pas besoin d’être diplômé en finance, en économie ou autre matière connexe pour embrasser une carrière en banque d’investissement, nous attendons de leur part la preuve de leur intérêt pour notre secteur. Un étudiant en médecine, en école d’ingénieurs ou en lettres classiques par exemple devra être capable d’exprimer en quoi la banque d’investissement de J.P. Morgan correspond à ses aspirations et disposer au moins d’une bonne compréhension globale de l’univers de la finance ».
Parlez toujours en assessment centre de vos activités extrascolaires
La question sur vos activités durant votre temps libre vous sera posée quasi systématiquement – mieux vaut donc y être préparé et proposer des exemples intéressants, susceptibles aussi de démontrer votre caractère de leader, d’entrepreneur ou autres traits particulièrement recherchés dans le secteur bancaire. Pensez, comme le suggère Maura Smith, à « fournir des réponses bien pesées qui pourront dénoter les multiples facettes de votre personnalité » avant de poursuivre : « la journée d’assessment centre nous permettra de dégager une impression globale de votre personnalité, et ainsi de prendre une décision en toute connaissance de cause pour la suite à donner à votre candidature. »
Faites de votre mieux lors des exercices en groupe
Si votre objectif est d’intégrer une banque d’investissement pour booster votre ego, et si vous pensez qu’une carrière dans ce secteur consistera d’abord à vous mettre en avant par rapport à vos collègues, alors il y a fort à parier que les exercices en groupe de l’assessment centre vous écartent définitivement du job auquel vous postulez. Les candidats sont répartis en groupe de quatre à six personnes et chaque groupe est généralement chargé de proposer une solution à un problème spécifique ; la solution sera ensuite présentée à un groupe de MD. Le point qui doit attirer votre attention n’est pas – et loin s’en faut – la qualité technique de votre réponse. Les banques utilisent les exercices en groupe pour évaluer vos aptitudes à la communication et au travail en équipe, et les MD passent en fait leur temps à écouter discrètement les discussions au sein de chaque groupe. Ce qui, pour Yukiko Hizumi, « permet à la banque de prendre la mesure de votre esprit d’équipe et de voir comment vous vous différenciez des autres – comme par exemple un candidat lambda qui endosserait le rôle de leader au sein de l’équipe tout en s’acquittant de la tâche qui lui a été assignée ».
Laissez au placard vos velléités de domination
L’astuce pour sortir indemne d’un exercice en groupe consiste à éviter de dominer la conversation, sans pour autant donner l’impression de faire tapisserie. C’est ce qu’explique Alex Wong, coach en carrière pour jeunes diplômés : « tout tient dans la façon de diriger la conversation malgré les opinions divergentes, et dans la manière de vous exprimer dans un environnement concurrentiel ». Assurez-vous d’apparaître plus sérieux et méthodique qu’impétueux et autoritaire.
Attendez-vous à l’inévitable question tordue
Même si vous sortez de l’épreuve par équipe sans avoir semblé ni trop passif, ni trop agressif, il reste pour Alex Wong un défi supplémentaire, et il est de taille : la plupart des banques font suivre l’exercice en groupe d’un entretien individuel assorti d’une question piège : comment pensez-vous avoir réussi l’épreuve de groupe ? Soyez le plus réaliste possible dans votre réponse – votre interlocuteur cherche à évaluer comment vous maîtrisez et exprimez vos forces et vos faiblesses.
Faites la différence pendant l’étude de cas
La séquence de ‘l’étude de cas’ est sans doute le moment le plus impressionnant de l’assessment centre. On vous donne un problème (et les documents qui lui sont liés) susceptible d’affecter la division pour laquelle vous postulez. Puis on vous accorde un temps limité pour construire une argumentation cohérente et parvenir à une conclusion claire, que vous présenterez à un jury de MD prêts à battre en brèche tous vos arguments. La clé de la réussite ne consiste pas à leur ressortir toutes les informations, mais à développer une argumentation assez simple que vous pouvez exposer dans le temps imparti et défendre en toute confiance. Pour Alex Wong, « certaines études de cas sont spécifiques à certaines divisions – celles qui portent sur les M&A par exemple vont tester vos compétences analytiques en fusions-acquisitions. Toutes en revanche cherchent à tester votre raisonnement logique et votre manière de le communiquer ». A quoi Yukiko Hizumi ajoute : « comme les entretiens, les études de cas sont menées sur une base individuelle et constituent une bonne occasion de vous évaluer sur différents critères – votre rapidité de réaction et votre capacité à fournir des solutions ou des réponses à des questions difficiles. »
Préparez-vous aux tests arithmétiques et écrits durant l’assessment centre
En dépit des différences d’une entreprise à l’autre, les banques utilisent de multiples techniques pour déterminer si vous êtes au point. Vous pouvez être confronté à des tests de calcul – même s’ils s’avèrent relativement simples pour les scientifiques diplômés en mathématiques, physique, économie ou issus des écoles d’ingénieurs, rompus aux calculs de pourcentages et à la lecture de graphes. On peut aussi vous proposer un exercice écrit – du simple courriel de quelques lignes au rapport de plusieurs pages – afin de tester vos compétences en communication écrite. On vous demandera par exemple de bâtir un raisonnement convaincant pour acquérir une société donnée en fonction des informations fournies par la banque. Il sera donc conseillé de présenter votre argumentation par une introduction, puis de fournir jusqu’à quatre arguments plaidant en faveur de votre approche, puis de clore votre démonstration par une conclusion. Attention, orthographe et grammaire devront être irréprochables.
L’effet cocotte-minute
Les aptitudes en communication et en calcul sont certes essentielles, mais l’assessment centre ne se résume pas à une série de défis autour de la technique. Alex Wong rappelle que les banques cherchent aussi à voir comment vous gérez la pression permanente au quotidien ; à part faire un trait d’emblée sur les pauses déjeuner en mode détente – ce qui, dans le contexte, coule de source – elles veulent estimer concrètement comment vous gérer les sollicitations dans le cadre réel d’un poste en IBD. Avant tout, gardez votre calme d’un bout à l’autre de l’assessment centre. Les questions tordues ont souvent un double objectif, comme par exemple vous faire réfléchir et vous exprimer en public et les rassurer sur votre capacité à ne pas craquer sous la pression.
Demandez à un analyste
Le meilleur moyen de savoir exactement ce qui vous attend pour sortir la tête haute d’un assessment centre pour un domaine donné d’une banque spécifique reste sans conteste de demander à des analystes en poste, passés récemment par les mêmes épreuves. Car comme le souligne Alex Wong, « les banques ne modifient que rarement leurs assessments centres – imaginez sinon le chaos administratif qui en découlerait ! » Autrement dit, « vous avez tout intérêt à découvrir comment ils se sont déroulés au cours des dernières années. »