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Témoignage : « 16 ans plus tard, 15% seulement des analystes de ma promo ont atteint les sommets »

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J’ai commence ma carrière en 1999/2000, à un poste de ‘research associate’. Je venais de sortir de l’école et de décrocher un job au bas de l’échelle en equity research, dans l’une des banques d’investissement européennes les plus respectées. Nous étions une vingtaine dans cette promo, tous plus ou moins du même niveau, et tous titulaires de diplômes aussi similaires qu’exemplaires. Nous étions tous conscients des enjeux : nous avions été recrutés pour être d’abord des bêtes de tableurs pendant deux ou trois ans, et avec un peu de chance, nous pourrions passer – pour de vrai – analystes en recherche de capitaux.

C’était il y a seize ans. Nous nous sommes retrouvés ce mois de décembre pour notre réunion annuelle. Et vous savez quoi ? Les carrières en banque n’évoluent pas nécessairement comme elles le devraient.

Sur les 20 personnes de ma promo, trois ont dû ‘aller au bout’. En d’autres termes, ils ont vraiment réussi : ils ont remboursé leurs prêts immobiliers et habitent de grandes maisons dans des quartiers huppés. Ils ont gagné des millions, vivent ‘la vie’ qui nous attendait – telle que nous l’imaginions à nos débuts, en nous escrimant sur nos tableurs il y a un peu plus de dix ans.

Quant aux autres, rien qui sorte de la normalité – beaucoup d’entre nous sont englués dans des jobs que nous n’apprécions pas forcément, d’autres étranglés par les prêts immobiliers et les frais scolaires ou universitaires des enfants.

Mais qu’est-ce donc qui différencie les trois au top – qui n’ont par ailleurs pas tous daigné honorer la réunion annuelle de leur présence car ils ne fréquentent plus ces milieux ? Tous ont choisi des voies professionnelles côté buy-side. Deux d’entre eux ont rejoint des hedge funds et le troisième exerce en capital-investissement ; les sommes qu’ils y gagnent gravitent dans une autre dimension par rapport aux salaires de ceux d’entre nous qui sont restés en sell-side. Ils jouent juste dans une autre catégorie.

Connaissant chacun des membres du groupe, et sachant comment leurs carrières ont évolué, il faut reconnaître que la chance y a joué un rôle prépondérant, bien plus que le talent. Travailler en equity research, c’est être dépendant des conditions de marché, et aussi des capacités de votre boss. Il faut être affecté à un secteur porteur quand le marché est en croissance, et avoir un boss capable de vous aider à évoluer. La recherche a tout d’un système quasi féodal : il faut prouver votre loyauté à votre seigneur avant de gagner votre liberté. Si votre seigneur est un gros nul et que vous vous trouvez de surcroît au mauvais endroit au mauvais moment, alors préparez-vous à manger du tableur jusqu’à ce que l’on vous éjecte !

En ce qui me concerne, mon boss est parti environ un an après mon arrivée. On m’a alors confié ses comptes – un rôle qui excédait largement mes capacités pour quelqu’un qui n’avait jamais été confronté qu’à Excel, qui me stressait et me faisait perdre mes moyens. Six mois plus tard, un nouvel analyste très bien noté et son équipe étaient embauchés pour reprendre le secteur, et moi, je prenais la porte.

Par comparaison, ceux qui étaient sortis du lot avaient de super boss qui leur prêtaient main forte. Ils avaient droit aux bons breaks au bon moment – et des supérieurs qui les aidaient à progresser, et leur permettaient d’évoluer dans la banque avant partir en hedge fund ou private equity. Celui des trois qui avait participé à la réunion était resté très humble : à l’entendre, il avait juste eu de la chance.

A bien y réfléchir, je ne suis pas malheureux de mon sort. J’occupe un poste parfaitement acceptable dans une agence d’intelligence financière, j’habite un appartement modeste dans un quartier sans histoires et je mène une vie tranquille. Je suis bien plus heureux que bon nombre de gens. Mais je ne corresponds pas à l’image que les profanes se font des professionnels de la finance – pas plus d’ailleurs que la plupart de ceux qui ont commencé avec moi. L’un des anciens de ma promo avoue envier la fille qui s’occupe de son chien – mais oui ! – en pensant qu’au bout du compte, « elle passe son temps dehors avec mon chien, et une fois effectué ses heures de travail, payé ses impôts et assuré les dépenses du quotidien, elle ne doit pas gagner tellement moins que moi. »

Brad Petworth est le pseudonyme d’un analyste en equity research en poste à Londres.

Crédit photo : Nepal – Island Peak – 009 – Climbing the summit headwall par McKay Savage, licence n° CC BY 2.0.


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