A l’occasion de la seconde édition de son événement annuel dédié aux « Femmes dans la finance », CFA Society France a organisé jeudi soir une table-ronde sur le thème : « Femmes & Gestion d’actifs : comment la diversité peut-elle faire la différence ? », où de nombreuses femmes ayant fait carrière dans la finance sont venues témoigner de leur expérience et promulguer quelques conseils. Voici ce qu’il fallait retenir de ces échanges très instructifs…
« La place de la femme dans la gestion d’actifs est mieux considérée que dans les autres métiers financiers comme par exemple la finance de marché ou la banque d’investissement », observe Odile Couvert, managing partner chez Amadeo Executive Search. Et de citer par exemple les fonctions commerciales, marketing ou spécialistes produits où les femmes sont légion. Dans la gestion d’actifs, on rencontre également beaucoup de femmes dans les structures small-caps, comme par exemple chez Mandarine Gestion.
A contrario, les hedge funds sont quasiment tous créés et dirigés par des hommes. « L’envie de monter sa propre structure d’asset management est peu répandue chez les femmes », constate Odile Couvert. Il y a bien sûr quelques femmes qui ont monté leur propre structure comme Nicole Notat (ex-secrétaire générale de la CFT) avec l’agence de notation extra-financière Vigeo ou bien Isabel Levy avec Métropole Gestion (qu’elle a fondée avec un homme), mais ces exemples restent isolés.
Etre à la fois femme et gérant, c’est possible…
« Le fait d’être une femme n’a jamais constitué un obstacle au cours de ma carrière professionnelle », confie Stéphanie Bobtcheff, l’une des deux femmes de l’équipe de 30 gérants que compte La Financière de l’Echiquier. Et de constater qu’il y a plus de femmes dans les grosses structures de gestion d’actifs comme Crédit Agricole ou Oddo où elle a également travaillé.
Qui plus est, cette mère de 5 enfants n’a jamais considéré sa vie familiale comme une contrainte. « Il est intéressant de vivre ces deux vies-là, tant qu’elles ne se mélangent pas ». Ce qui, dans les faits, requiert un minimum d’organisation comme par exemple planifier à l’avance ses congés maternité. « Trois maternités en cinq ans exclut une femmes des postes de managers », ajoute Odile Couvert.
« Heureusement, de nouvelles formes d’organisation du travail, comme le télétravail, permettent de mieux concilier vie familiale et vie professionnelle », fait remarquer pour sa part le seul homme du panel de la table-ronde, Olivier Paquier, responsable des ventes SPDR et ETF chez State Street Global Advisors.
… à condition de s’affirmer dans un monde d’hommes
« Les disparités significatives s’accentuent au fur et à mesure que les femmes montent dans la hiérarchie », relève Isabelle Bourcier, ancienne responsable mondiale EFT chez Lyxor (Société Générale) et ex-directrice du développement d’Ossiam (Natixis AM), qui l’an dernier a lancé l’association internationale Women in ETF, un réseau qui fédère les femmes spécialistes de la finance.
« A la City de Londres, femmes représentent 65% des employés, 25% des managers et 6% des C-levels », rappelle Sophie Mouterde, coaching outplacement chez OasYs Consultants. Selon elle, l’émergence de femmes à des postes clés (notamment dans les pays anglo-saxons) permet plus facilement aux financières de se projeter à des postes de responsabilités, même s’il existe encore un ‘plafond de verre’ du fait de la place de la femme dans un monde d’hommes.
Ainsi, les équipes 100% masculines se caractérisent par des préjugés envers la gente féminine (ex : ‘nous, on n’est pas des gonzesses !’), une volonté de rester fort en dissimulant leurs émotions, des sorties bien ciblées (matchs de rugby, tournois de golf, virées au pub…) et l’allégeance au Chef (les femmes se montrant plus critiques sur ce point ). « Quand une équipe est composée de plus de 20% de femmes, on sort de ces stéréotypes », constate Sophie Mouterde.
Quand les femmes s’autocensurent… à tort
Mais le plus grand obstacle à l’ascension professionnelle des femmes ne sont pas les hommes…. mais les femmes elles-mêmes quand elles s’autocensurent (c’est pourquoi l’on parle d’un ‘double plafond de verre’). « Les femmes s’excluent elles-mêmes de beaucoup de jobs », confirme Odile Couvert. « Tous mes clients recherchent des femmes si bien que dans ma liste de candidats, où il y a autant de femmes que d’hommes, je vais souvent d’abord chercher des femmes, et pourtant au final, c’est souvent un homme qui est recruté ».
« Les femmes auraient d’autant plus tort de s’autocensurer que des études montrent que les performances des sociétés de gestion sont meilleures quand des femmes sont au board », note Olivier Paquier de chez State Street qui a lancé en mars dernier le fonds SHE ETF avec comme critère d’investissement la diversité.
Enfin, les femmes auraient tort de se priver d’un bon salaire. « En gestion d’actifs, il n’y a pas de différence de salaires sur les métiers front car la rémunération est calculée sur la base de la performance », rappelle Odile Couvert. Alors, mesdames, un mot d’ordre sui vous vous voulez faire carrière en gestion d’actifs : Foncez ! « Et pour celles qui voudraient passer la certification CFA, sachez que le CFA Institute vient de lancer une Bourse à destination des femmes qui ne seraient pas éligibles aux autres dispositifs d’aides financières déjà mis en place », conclut Myriam Ferran, présidente de CFA Institute France.