Si vous poussez une porte et que celle-ci reste fermée, alors vous n’aurez pas d’autre alternative que de pousser une autre porte. C’est ce que j’ai appris dans ma carrière financière en 2016. Je suis un credit trader. Depuis que j’ai quitté l’université, j’ai passé mon temps à travailler sur le marché obligataire. Dans mon dernier poste en trading, j’étais director sales trading, travaillant à travers une gamme de produits. Puis j’ai perdu mon emploi. Et maintenant ? Maintenant, je travaille dans les risques.
Je ne m’attendais pas à cela. Je savais que me retrouver sur le marché de l’emploi serait difficile, mais je pensais que je serais toujours capable de me recycler dans un autre poste de trading dans les six mois. Je faisais le difficile. J’ai eu des offres pour travailler dans le courtage, mais je les ai toutes refusées ; il était question d’être payé à la commission et avec des volumes si faibles, le courtage semblait une option risquée. Par ailleurs, j’étais un trader.
Au départ, je ne voulais pas faire de compromis. Je me suis donc accroché, en postulant à des emplois dans le trading. J’ai envoyé des CV. Sans réponses. J’ai donc envoyé une autre salve de CV. Toujours rien. Je commençais à penser que le marché était contre moi – c’était avant le référendum sur le Brexit et les recruteurs étaient sur le qui-vive. Il est devenu évident que la recherche d’un emploi allait être beaucoup plus difficile que je ne l’avais prévu.
Et donc, j’ai fait ce que tout le monde fait quand personne ne veut de vos compétences : j’ai capitulé. J’ai arrêté de chercher à devenir trader et j’ai postulé dans la gestion des risques.
Soudainement, les portes se sont ouvertes.
Le fait est qu’il y a désormais beaucoup plus d’opportunités pour les gestionnaires de risques que pour les traders. Le risque est une activité en pleine croissance, pas le trading. La sécurité de l’emploi est meilleure dans les risques et les possibilités de progression de carrière y sont plus nombreuses. Je n’ai même pas à me plaindre de mon salaire, les métiers du risque étant plutôt bien payés, et ce en dépit de bonus étonnement bas.
Travailler dans les risques n’est pas ce que j’attendais (je suis un trader, bon sang !) mais au moins je travaille. Les risques ne constituent pas pour moi un point de chute naturel, bien que je commence à penser que je pourrais peut-être y faire carrière. Mes collègues de front office, qui connaissent mon expérience, me traitent avec plus de respect que les autres membres de notre équipe de risque, ce qui a au moins le mérite d’avoir quelques avantages.
Oui, je suis frustré : je n’interviens plus sur le desk de trading et je ne prends plus de décisions, ce dont j’ai du mal à m’habituer. Les banques sont des lieux hiérarchiques et subitement, je me retrouve quelques échelons plus bas. C’est bizarre de voir des gens faire mon ancien job. Je me sens comme un joueur de football qui est coincé dans les gradins, condamné à regarder le match.
Cela a au moins le mérite de me faire situer près du bon endroit. Je pourrais être assis à la maison à envoyer des CV en me demandant quand et si quelqu’un répondra. Si votre CV est ignoré, la meilleure chose que vous puissiez faire est de prendre le temps de voir les choses en face. Ne blâmez pas les recruteurs pour leur absence de réponse; ne blâmez pas le marché pour ne pas vouloir de vos compétences : reconditionnez votre expérience en quelque chose que le marché voudra. Suivez la vague, vous ne saurez jamais où elle vous conduira.
Arturo Martinez est le pseudonyme d’un senior en fixed income trading à Londres qui actuellement travaille dans les risques.
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